«Vous venez d'arriver à Paris? Eh bien, mon cher, votre première visite doit être pour Notre-Dame.
— J'irai volontiers cet après-midi visiter la célèbre cathédrale.
— Pourquoi pas ce matin? Il fait beau. En ce jour de printemps l'air est doux et léger. Pourrions-nous trouver plus pure lumière? D'ailleurs l'après-midi, nous serions gênés par les caravanes de touristes... Venez, je vais vous servir de guide.
— Notre-Dame est la plus vieille église de Paris, n'est-ce pas?
— Non. L'église Saint-Pierre, sur la butte Montmartre, est plus ancienne de quarante ans.
— En quelle année a-t-on commencé la construction?
— En 1163 exactement. On y atravaillé jusqu'au XIV-e siècle. Tout le peuple a collaboré à cette œuvre grandiose: terrassiers, maçons, sculpteurs, verriers, orfèvres. Saint Bernard avait pu s'indigner, disant: «L'Eglise couvre d'or ses pierres et laisse ses fils sans vêtements!»1 l'évêque de Paris, lui, trouvait que rien n'était trop beau pour le service de Dieu...
— On n'a pas tout construit à la fois, j'imagine? Par où a-t-on commencé l'édifice?
— Par le chœur. Puis on a édifié la nef, et les portails du transept. Mais, venez dans le square, tout près d'ici. Vous aurez une vue splen- dide sur le monument: Quelle harmonie! Il y a en France des cathéd- rales plus vastes2 et plus hautes3. Il n'y en a pas de mieux proportion- nées dans leur architecture.
— Qu'est-ce que cette rangée de statues, sur la façade?
— Ce sont les rois de Juda et d'Israël. Longtemps on les a pris pour les rois de France. Les pèlerins se les désignaient du doigt: «Voici Pépin le Bref, voici Charlemagne...» Et d'adroits voleurs profitaient de ce qu'ils avaient le nez levé pour couper leur bourse, par derrière.
— Cette grande verrière au-dessus du portail central, c'est la rosé, n'est-ce pas?
— Oui. Avec ses dix mètres de diamètre, elle était la plus vaste à l'époque. Depuis sept cents ans, presque rien n'a bougé dans sa structure, tellement elle fut bien conçue4...
Du haut des tours on découvre la Cité, la Seine, l'immense ville. Victor Hugo, vous le savez, a célébré ce spectacle, dans son fameux
roman Notre-Dame de Paris et aussi Georges Duhamel, dans la Chronique des Pasquier5. Voulez-vous faire l'ascension?
— Non, merci, j'ai horreur des escaliers à vis; ils me donnent mal au cœur... Mais, dites-moi, ce monument a été témoin de bien des événements historiques?
— Certainement: à Notre-Dame ont été célébrés deux sacres: celui d'Henri VI d'Angleterre, qui, à neuf ans, y fut sacré roi de France (royauté éphémère)! C'était pendant la guerre de Cent Ans...) 6 — et le sacre de Napoléon 1-er, en présence du Pape Pie VIL On ne compte pas les cérémonies fastueuses qui se sont déroulées ici. Mais Notre-Dame servait aussi, jadis, de Maison Commune; on y donnait de grands festins; les criminels y trouvaient asile contre la police; on y déposait bijoux et objets précieux quand on partait pour un long voyage; on y faisait des expositions: défenses d'éléphants, œufs d'autruche7...
«Aujourd'hui les expositions n'ont plus ce caractère profane!8 Pendant la Semaine sainte par exemple, ce sont les reliques de la Passion qui y sont offertes à l'adoration des fidèles: un fragment de la couronne d'épines, les clous et le bois de la Croix. Et si vous êtes encore à Paris au mois de juin, venez donc assister au Mystère de la Passion9, joué sur le parvis1 par des centaines d'acteurs bénévoles", comme au Moyen Age. Les représentations ont lieu le soir, dans la lumière des projecteurs, avec, pour décor, la magnifique façade de la cathédrale».
G. M. Примечания:
1. См. "Путеводитель Мишлен (Париж)". 2. В Шартре. 3. В Бове. 4. См. стр. 28. 5. "Хроника семьи Паскье" (10 томов). 6. Война Англии и Франции 1337 - 1453 ("Столетняя война"). 7. J.Hillaiter, Évocation du viaex Pans. 8. Мир- ской, светский. 9. "Мистерия о Страстях", состоящая из 35000 стихов и повест- вующая о Страстях Христовых. 10. Паперть. 11. Играющие бесплатно.
ТЕКСТ 25
PARIS
Au pied des tours de Notre-Dame, La Seine coule entre les quais. Ah! le gai, le joli muguet! Qui n'a pas son petit bouquet? Allons, fleurissez-vous, mesdames! Mais c'était toi que j'évoquais Sur le parvis de Notre-Dame: N'y reviendras-tu donc jamais? Voici le charmant mois de mai...
Je me souviens du bel été,
Des bateaux-mouches sur le fleuve
Et de nos nuits de la Cité.
Hélas! qu'il vente, grêle ou pleuve1,
Ma peine est toujours toute neuve:
Elle chemine2 à mon côté.
Dans le jardin du Luxembourg, Les feuilles tombent par centaines Et j'entends battre le tambour Tout en courant la prétentaine3 Parmi des ombres incertaines Qui me rappellent nos amours.
Francis Carco. La Romance de Paris.
Примечания:
1. Soit qu'il vente, soit qu'il grêle, soit qu'il pleuve... 2. Идет очень медленно и тихо. 3. Блуждая в поисках любовных приключений.
ТЕКСТ 26
A LA PRÉFECTURE DE POLICE
Yankel, nouvellement arrivé à Paris, se présente à la Préfecture de Police.
Le visage souriant et ]e cœur tendre, Yankel donc, sur les talons de M. Kratzmann, pénétra dans l'antre1 de la police. Derrièreune table, les coudes sur le bois et les poings aux joues, un concierge en uniforme, ' avec une belle chaîne de métal sur le ventre, était plongé dans la lecture d'un journal. M. Kratzmann se découvrit poliment et lui adressa la parole; sans lever le nez, le concierge, au bout d'un long moment, grogna quelque chose. M. Kratzmann remercia avec beaucoup de chaleur — avec trop de chaleur même, pensa Yankel, ça manquait de dignité; puis le chapeau toujours bas, il se dirigea vers un guichet. Yankel hésita. Fallait-il, ne fallait-il pas se découvrir en ce lieu? La plupart des gens étaient couverts. Bah! pourquoi s'exposer à des humiliations? Pourquoi risquer qu'un fonctionnaire vous fît sauter la casquette d'un revers de main? Qu'est-ce que ça coûte de la retirer soi- même? Yankel la retira. Comme on étouffait de chaleur, rester nu-tête n'avait rien que de naturel, non?
Il y avait foule au guichet. Foule pas très ragoûtante2, pensa Yankel à part soi3 des gens mal tenus, vulgaires, qui sentaient mauvais, des étrangers crasseux, piaulant4, piaillant5, jacassant6, jargonnant7 en tous langages. Yankel se sentait humilié de se mêler à eux, d'être confondu avec eux. Il était8 étranger mais respectable, lui, il n'appartenait pas à cette écume9 des nations! Aussi se montra-t-il très froid à leur égard, pas liant pour deux sous10; même au jovial M. Kratzmann, qui l'entreprenait sans cesse, il ne répondit que par monosyllabes. Au fond, il avait un peu honte de parler yiddish11 ici. La police parisienne, pensez! D'autant que M. Kratzmann ne parlait pas, mais glapissait12. Tout le monde d'ailleurs glapissait dans cette salle, et ça faisait un vacarme des cinq cent mille diables, et toutes les cinq minutes, un militaire de la police s'approchait, les yeux furibonds, et se mettait à rugir. Sans doute invitait-il les gens au silence, car les criail-leries baissaient d'un ton pendant quelques instants, pour reprendre ensuite. Mais ce qui étonna fort Yankel, ce fut de voir un des étrangers, et même des plus mal vêtus, discuter sans peur, à grand renfort de gestes, avec le militaire de la police. Discuter avec un porteur d'uniforme? Il allait se
faire taper dessus!.. Non. Il ne se passa rien. Le militaire se mit à rire, leva les bras au ciel, et s'écarta. «Quelle anarchie!» pensa Yankel malgré lui.
Enfin, il arriva devant le guichet, et s'étonna de plus belle: l'homme qu'il voyait de l'autre côté, un petit vieux à crâne chauve et moustache fatiguée, ne portait pas d'uniforme. Oui, un simple civil, vêtu d'alpaga13. (...) En Russie', quiconque occupe un poste dans la hiérarchie des fonctionnaires a droit à l'uniforme, avec boutons dorés, épaulettes. insignes divers; pour rien au monde on ne renoncerait à ce droit, et souvent même on porte un corset sous l'uniforme pour paraître plus martial; le dernier des facteurs ruraux arbore15 ainsi son petit uniforme et se sent quelqu'un. Alors ici, en pleine police, on trouve des gens sans uniforme? Et à Paris encore, dans la capitale? «Hmm! comme c'est humain, ça!» pensa Yankel, avec une ferveur assez artificielle. Car, au fond, il regrettait les uniformes. Ça vous pose un homme, l'uniforme; on a beau dire, ça donne le sens de la responsabilité, de l'importance, ça inspire le respect aussi; tandis que ce petit vieux, là, regardez-moi ça, c'est chiffonné, c'est pauvre, quoi!.. Presque dégradant.
Il avait déballé devant le guichet ses innombrables papiers russes. M. Kratzmann les présentait l'un après l'autre au petit vieux, en les accompagnant d'un gracieux gazouillis16 avec envol de mains. (...) Et M. Kratzmann gazouillait, gazouillait éperdument... Gazouillait seul. De l'autre côté du guichet, le fonctionnaire, quoique civil, ne gazouillait pas. Il n'avait pas ouvert la bouche, le fonctionnaire; pas levé les yeux, pas touché ni seulement regardé les papiers que M. Kratzmann agitait devant lui, d'un air engageant avant de les poser sur la planche. Il écrivait sur un registre, le fonctionnaire, il tamponnait avec un buvard ce qu'il avait écrit, il appliquait un cachet; puis, il tournait la tête vers son voisin du guichet suivant, échangeait en riant quelques mots avec lui, tandis que M. Kratzmann s'interrompait; il revenait à son registre et aussitôt M. Kratzmann, qui, de ses petits yeux vifs, ne le perdait pas de vue, recommençait à gazouiller de plus belle. «Mais... mais il ne s'occupe même pas de nous!» se dit soudain Yankel, révolté. Alors, qu'est-ce que M. Kratzmann avait à jacasser ainsi pour rien? Pas de dignité, cet homme!
Enfin le fonctionnaire, toujours sans regarder, tendit la main par le guichet, attrapa les papiers, y jeta un coup d'œil, et poussa un soupir
excédé qui souleva les barbes17 de sa moustache: il n'aimait évidemment pas l'écriture russe. Sans doute avait-il des interprètes à sa disposition, mais il fallait les appeler, c'était toute une histoire18... Cependant M. Kratzmann gazouillait avec la dernière énergie, et Yankel pensait que le français est une langue mélodieuse à entendre, mais tout de même pas aussi mélodieuse ni énergique que le russe.
ROGER IKOR. Les Fils d'Avrom. Les Eaux Mêlées. Примечания:
1. Логовище, вертеп. 2. Разг. Не слишком аппетитная. 3. Про себя. 4. Пищать как цыпленок. 5. Кудахтать как курица. 6. Стрекотать как сорока. 7. Говорить на непонятном языке. 8. = il se disait qu'il était... — Style indirect libre, sans verbe principal exprimé. On en verra d'autres cas, plus loin. 9. Отбросы, отребье. 10. Разг. Неприветливый. 11. Идиш — еврейский язык, основанный на старонемецком и распространенный в Центральной Европе и Америке. 12. Разг. Громко говорил, кричал. 13. Альпага - легкая шерстяная ткань. 14. Речь идет о царской России. 15. Выставлять напоказ, гордиться. Так на кораблях поднимают на всеобщее обозрение (on arbore) национальный флаг. 16. Чириканье, щебетанье. Les petits oiseaux gazouillent dans les arbres. 17. Зд. Волосы. 18. = C'était bien compliqué!
ГРАММАТИКА___________________________
БЕЗЛИЧНЫЕ ГЛАГОЛЬНЫЕ КОНСТРУКЦИИ (VERBES CONSTRUITS IMPERSONNELLEMENT)
Вы уже знакомы с собственно безличными глаголами: il pleut, il faut. Но есть другие глаголы, которые в начале предложения могут выступать в безличной форме, то есть относиться к грамматическому подлежащему (faux sujet) il.
Логическое подлежащее — vrai sujet (существительное, местои- мение) в данном случае стоит после глагола в безличной конструкции, который не согласуется с ним ни в роде, ни в числе.
// ne se passa RIEN (= Rien ne se passa, n'arriva). — Il venait chaque jour DE NOMBREUX ÉTRANGERS devant le guichet (= De nombreux étrangers venaient chaque jour devant le guichet). — IL EST RACONTÉ bien des sottises, IL SE RACONTE bien des sottises.
Безличная конструкция возможна со следующими глаголами:
непереходные с активным залогом:venir, arriver, partir, tomber, monter, descendre, и т.д.
возвратные:se produire, se présenter, s'écouler, и т.д.
с пассивным залогом:être dit, être écrit, être raconté, être permis, être défendu.
N.B. — Логическое подлежащее может быть выражено союзным придаточным предложением или инфинитивом: // arrive QUE tu fasses ERREUR. — // est permis DE SE TROMPER.
УПРАЖНЕНИЯ
I) Образуйте безличные обороты (Напр.: Une foule de gens se pressaient ou guichet = II se pressait une foule de gens ou guichet): Retirer sa casquette ne coûtait rien. — Des policiers allaient venir pour taper sur ceux qui faisaient trop de bruit. — Quelque temps s'était écoulé avant que le fonctionnaire examinât les papiers de Yankel. — Toutes sortes de langages se parlaient dans cette foule. — Discuter avec des gens en uniforme n'aurait pas dû être permis. — Des gens de tous les âges arrivaient au poste de police.
II) Образуйте личные обороты (Напр.: Il s'est passé bien des choses depuis la dernière guerre = bien des choses se sont passées depuis la dernière guerre): II s'échange de curieux propos derrière un guichet. — Il est interdit de parler avec le conducteur. — Il entre des sentiments de toute espèce dons le respect de l'uniforme. — II s'est rarement présenté une occasion aussi favorable. — -H est promis une bonne récompense à qui rapportera cet objet. — Chaque jour il circule des milliers de gens par le métro. -
III) Опираясь на 2-й и 3-й абзацы текста для чтения, восхвалите, а затем раскритикуйте ношение мундира.
ТЕКСТ 27
LE PALAIS ET LA SAINTE-CHAPELLE
«Pourquoi dit-on le Palais? N'y a-t-il pas d'autres Palais à Paris?
— Mais si; seulement cet immense édifice, bâti au cœur de la Cité, fut dès l'origine le palais des gouverneurs romains, puis des premiers rois de France. Et on continue de l'appeler comme autrefois. C'est un monument chargé d'histoire. Saint Louis y a vécu. Souvent, l'été, il allait s'asseoir avec ses conseillers dans un jardin à la pointe de l'Ile et, au milieu de ses vignes, il écoutait les plaideurs exposer leurs procès.
— Quel aimable visage ce bon roi donnait à la justice!
— Oui, mais ces tours sévères qui aujourd'hui bordent la Seine, ont un visage autrement sinistre1: la Tour Bonbec, par exemple.
— Bonbec? Pourquoi Bonbec?
— Parce qu'on y soumettait à la torture les prisonniers récalcitrants2: la torture les faisait parler plus facilement; les malheureux avaient alors «bon bec»!
— Cet expression me rappelle le refrain d'un célèbre poète du Moyen Age...
— Villon disait, en effet: «Il n'est bon bec que de Paris», c'est à Paris qu'on parle avec le plus de vivacité et d'esprit, les femmes surtout... Venez par ici. Entre ces deux tours, toutes noires, s'ouvre la porte de la Conciergerie...
— Y avait-il donc un vrai concierge à la porte?
— Non, on appelait ainsi un important personnage, juge royal et gouverneur des prisons. Dans les cachots de la Conciergerie, donc, étaient enfermés, pendant la Révolution française, aristocrates ou bourgeois, avant d'être conduits à la guillotine: la reine Marie- Antoinette, le poète André Chénier, Charlotte Corday, qui avait assassiné Marat, — et, pour finir, Robespierre lui-même... Ces lieux ont vu couler bien des larmes, mais ils ont été témoins aussi de beaucoup de courage et de crânerie3 devant la mort...
— Par où passaient les prisonniers quand ils quittaient leur cachot pour monter à l'échafaud?
— D'abord les aides du bourreau les menaient dans l'étroite pièce que voici, les asseyaient sur un tabouret, leur liaient les mains derrière le dos, leur coupaient les cheveux et le col de la chemise4. Ensuite, ils les entassaient sur la charrette qui les attendait dans la cour du Palais... Mais laissons ces tristes souvenirs de la guerre civile et allons voir la Sainte-Chapelle qui se dresse tout près.
— C'est cet admirable édifice, si élancé, si frêle, où la pierre semble réduite à rien?
— Oui. Il n'a pas changé depuis des siècles. Tous les architectes s'étonnent devant ce miracle d'équilibre. Entrons.
— Oh! l'admirable lumière! Partout des vitraux: bleu, rouge et or, l'effet est éblouissant!
— Le roi saint Louis a fait édifier la Sainte-Chapelle pour y abriter la couron d'épines rapportée des croisades. Avouez que l'écrin était digne de la relique.
«Et maintenant allons faire un tour au Palais de Justice, puisque le même nom désigne la maison royale et l'ensemble des tribunaux modernes...
«Il est midi. C'est l'heure des audiences. Dans la salle des Pas perdus nous rencontrerc les avocats en robe et les plaideurs. Et, si vous le désirez, nous assisterons à une audience de la Cour d'Assises où se jugent les procès criminels, ou du tribunal de grande instance ou tribunal correctionnel qui juge les simples délits.»
G. M.
Примечания:
1. Куда более зловещий лик. 2. Строптивых, которые отказывались признаваться. 3. Отваги, ухарства. 4. См. "Путеводитель Мишлен (Париж)"'.
ТЕКСТ 28
TRIBUNAL OU MUSIC-HALL?
Seizième chambre correctionnelle. Au banc des prévenus un jeune homme de vingt-quatre ans, Claude L..., se déclare guérisseur-magnéti- seur1, ce qui lui vaut d'être poursuivi pour exercice illégal de la médecine. Il expose gravement que sa «vocation» lui est venue aux environs de la vingtième année. Il était infirmier dans la marine et souffrait d'une mastoïdite2 qui, assure-t-il, fut mal opérée. «Le chirurgien, monsieur le président, avait laissé une mèche3 dans mon oreille. Je souffrais terriblement. Un jour j'ai lu un traité sur le magnétisme. J'ai appliqué sur moi-même cette méthode et à ma grande surprise je fus guéri.»
Il aurait dû s'en tenir là. Mais la bonne nouvelle se répandit parmi ses amis. On vint le solliciter de faire bénéficier les autres de ses talents. Il trouva là une source de revenus. Chaque visite coûtant mille francs.
Naturellement, il y a des témoins. L'un vient dire qu'il souffrait des reins et que le fluide de Claude L... l'a guéri. Il plonge sa main dans sa poche, la retire, et la tend ouverte vers le tribunal:
«Voici mes calculs!»4 dit-il.
Le président fronce les sourcils: «Ne vous moquez pas de nous! Pas de burlesque" ici!»
La main se referme et les calculs retournent dans la poche...
Deuxième témoin, une jeune fille, rose et blonde. Le président, qui connaît le dossier, prend les devants:
«Vous aviez mal?
— Oui, aux mains, c'était héréditaire...
— Et vous êtes guérie? Bon, merci, vous pouvez vous retirer.» Claude L... veut poser une question. Innocemment6 on lui accorde ce droit.
Alors tourné vers le témoin il se met à compter: un, deux, trois, quatre...
La jeune fille rose et blonde vacille, ferme les paupières.
«Vous voyez, monsieur le président, elle dort...»
Le président ne veut pas voir. Il lève l'audience, dans une grande colère: «Vous vous croyez au music-hall! Le tribunal reviendra quand le témoin sera réveillé.»
La fille dort toujours. Claude consent à la réveiller. Le tribunal peut revenir. Le prévenu7 reçoit une nouvelle semonce8: il ne paraît guère impressionné.
On plaide. M-e Dupont, défenseur, sollicite l'indulgence. Il met tout sur le compte de ce maudit fluide qui chatouille trop les doigts de Claude. «Mon client n'est pas tout à fait inutile, dit-il; il détecte9 le cancer, et, quand il l'a détecté, il envoie le malade à un médecin, car il sait bien que ses pouvoirs sont limités.»
Bref, ce serait le plus consciencieux des magnétiseurs.
Mais le tribunal applique la loi. Il est condamné à 500 francs d'amende. Il devra verser en outre la même somme à la chambre syndicale des médecins de la Seine, ainsi qu'au Conseil de l'ordre des médecins, parties10 civiles.
D'après J.-M.THÉOLLEYRE. Le Monde. Примечания:
1. Целитель-гипнотизер (совр. экстрасенс). 2. Мастоидит — воспаление височной кости, осложнение гнойного воспаления среднего уха. 3. Хирургический фитиль, т.е. кусочек марли. 4. Почечные камни. От латинского слова, означающего "caillou" (камень). В древности для счета пользовались камешками; так слово calcul получило значение "счет". 5. Шутка. 6. Наивно, доверчиво, не думая о возможных последствиях. 7. Обвиняемый. 8. Строгое предупреждение. 9. Обнаруживает у больного. 10. Истцы в гражданском процессе. Слово «partie» имеет смысл "противник", отсюда выражение: prendre quelqu'un à partie (= подать на кого-нибудь в суд, выругать, обозлиться и т.д.).
ТЕКСТ 29
TOUT DORT. LE FLEUVE ANTIQUE...
Tout dort. Le fleuve antique entre ses quais de pierre Semble immobile. Au loin s'espacent des beffrois, Et sur la cité, monstre aux écailles de toits, Le silence descend, doux comme une paupière.
Les palais et les tours sur le ciel étoilé Découpent des profils de rêve. Notre-Dame
Se reflète, géante, au miroir de mon âme. Et la Sainte-Chapelle a l'air de s'envoler!..
Tout dort dans les maisons où regarde la lune. Et ceux-là qu'éreinta2 la vie et son travail Jouissent, poings fermés, leur somme3 de bétail Ou galopent, furieux, la course à la fortune.
Paris est recueilli4 comme une basilique; A peine un roulement de fiacre, par moment, Un chien perdu qui pleure, ou le long sifflement D'une locomotive — au loin — mélancolique.
Albert Samain. Le Chariot d'Or.. Примечания:
1. Beffroi (т.): дозорная башня, каланча. 2. Разг. Изнурила, измотала. 3. Mot masculin = sommeil (короткий неглубокий сон). Слово "jouir" здесь употреблено в его старом значении, то есть как переходный глагол (= jouir dèf. Это же относится и к глаголу galoper (см. грамм.). 4. Молчаливый и задумчивый. -
ГРАММАТИКА___________________________
ПЕРЕХОДНЫЕ И НЕПЕРЕХОДНЫЕ ГЛАГОЛЫ (VERBES TRANSITIFS, VERBES INTRANSITIFS)
I. — Некоторые глаголы, называемые непереходными, могут употреб- ляться с дополнением, не меняя при этом своего значения: courir une longue course; vivre une vie pénible; pleurer de vraies larmes; dormir son dernier sommeil (данные выражения принадлежат к литературному языку);
— parler une langue étrangère; descendre une rue; monter un escalier; passer un pont (данные выражения принадлежат к разговорному языку):
Ils galopent, furieux, LA COURSE à la fortune.
Но некоторые глаголы при этом обретают особое значение: pleurer un ami (= regretter profondément...); sortir la voiture du garage (= faire sortir...); descendre une malle (= porter vers le bas...); monter une malle (= porter vers le haut...); courir un danger, un risque (= être exposé à...). Все эти выражения относятся к разговорному языку.
II. — Многие глаголы, называемые переходными, могут употребляться без дополнения (напр.: voir, écouter, attendre, recevoir, manger, boire, chanter).
Tout dort dons les maisons où REGARDE LA lune. — Le médecin ne REÇOIT plus.
Некоторые глаголы при этом меняют свое значение:
Les plantes POUSSENT (grandissent).
III. — Некоторые глаголы им еют разные лексические значения в зави- симости от того, в какой конструкции они используются:
Le pain manque (непереходный);
Je manque le train (переходный с прямым дополнением);
Je manque de pain (переходный с косвенным дополнением,
вводимым предлогом de);
Ne manque pas à tes devoirs.
То же самое относится к глаголам: servir, tenir...
УПРАЖНЕНИЯ
I) Составьте предложения, употребляя каждый из данных ниже глаголов в переходном и непереходном значении: Crier — frapper — glisser — lire — ouvrir — sentir — chercher — tenir.
II) Задайте вопросы к данным предложениям, чтобы отличить глаголы, употребленные с косвенным дополнением, от глаголов, употребленных с обстоятельствами места, причины или образа действия. (Напр.: Je manque... de
quoi? — de pain: objet indirect. — Je sors... d'où?, — de voiture: complément circonstanciel de lieu.)
Beaucoup trop de gens ne pensent qu'à leurs intérêts et veulent jouir de la vie. — Les enfants accourent à grands cris. — Je tombe de fatigue. — Notre-Dame ressemble à une géante. — Ces renseignements proviennent d'une personne de bonne foi. — II n'y a plus beaucoup de fiacres qui roulent à Paris. — Cette personne descend d'illustres ancêtres.
III) Составьте предложения с глаголами: servir, servir à, servir de, tenir, tenir à, tenir de.
IV) В трех последних строках стихотворения восстановите сказуемое, за которым должны следовать три придаточных предложения (например, относительных или инфинитивных).
V) Литературный комментарий к тексту. Объясните значение:
1. цезур (пауз), отмеченных точками в 1 и 2 строках стихотворения.
2. "переноса", разделения одной фразы на 15 и 16 строках Какой эффект производит данный прием?
3. образов, воспроизводимых 3, 4, 6 и 12 строками.
СЛОВАРЬ
(Существительноеsommeil). Объясните значение выделенных слов и словосочетаний:Tous les jours, après le déjeuner, ce vieillard fait un somme de dix minutes. — Ma digestion est difficile. Après le repas j'ai des somnolences fréquentes. — // ne dort pas; il sommeille seulement. — Votre fils est-il bon élève? — Hélas, non: les professeurs le traitent d'endormi. — Dans ce tombeau, un roi dort son dernier sommeil. — Vous me racontez là une his- toire stupide, une histoire à dormir debout. — Les eaux des étangs sont des eaux dormantes. Celles des rivières sont des eaux vives. — Je donnerai tout mon soin à votre affaire. Vous pouvez dormir sur vos deux oreilles. — La souris fera bien de se méfier: le chat ne dort que d'un œil. — Je croyais avoir gagné le gros lot: hélas! ce n'était qu'un rêve. — Allons! oublie tout ce passé qui n'est plus qu'un mauvais rêve. — A quoi rêves-tu? Réponds donc! — J.-J. Rousseau a écrit des Rêveries du promeneur solitaire».
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